Des militants géorgiens pro-européens ont manifesté contre le report par le gouvernement des discussions d'adhésion à l'Union européenne jusqu'en 2028, devant le Parlement, au centre de Tbilissi, le 11 décembre 2024 (Giorgi ARJEVANIDZE).
Des milliers de manifestants pro-européens se sont de nouveau rassemblés mercredi à Tbilissi, à trois jours de l'élection présidentielle au suffrage indirect, une consultation censée consolider le contrôle du parti au pouvoir, accusé de détourner la Géorgie de son parcours européen, après des législatives controversées.
Agitant des drapeaux de l'Union européenne et de la Géorgie, plusieurs milliers de personnes se sont réunies devant le Parlement, au quatorzième jour consécutif de manifestations.
"Cela fait maintenant deux semaines et je viens ici tous les soirs comme si c'était mon travail, et je continuerai à venir jusqu'à ce que nous ayons de nouvelles élections législatives", a déclaré à l'AFP Tamta Kvilitaia, une étudiante de 20 ans. "Ce gouvernement illégitime doit partir".
"Notre lutte pour la démocratie et un avenir européen ne s'arrête pas, et j'espère sincèrement que le monde démocratique ne nous laissera pas seuls face à la dictature", a ajouté Levan Chavgoulidzé, architecte de 59 ans.
Selon des médias locaux, des manifestations se déroulent également dans d'autres villes de cette ancienne république soviétique du Caucase.
Candidate à l'adhésion à l'Union européenne, la Géorgie est plongée dans une crise politique depuis les élections législatives du 26 octobre, remportées par le parti Rêve géorgien, au pouvoir depuis 2012, mais contestées par l'opposition pro-occidentale pour des irrégularités.
C'est la décision des autorités, il y a deux semaines, de reporter à 2028 les ambitions du pays d'intégrer l'UE qui a déclenché des manifestations émaillées de violences, sans entamer la détermination des contestataires ou faire fléchir le gouvernement, accusé par ses détracteurs de dérives autoritaires prorusses.
La police a employé des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour disperser les rassemblements quotidiens, arrêtant plus de 400 manifestants, selon des chiffres officiels.
De nombreux cas de violences policières contre des manifestants et des journalistes ont été documentés par des ONG et l'opposition, une répression dénoncée par les États-Unis et les Européens qui ont menacé de prendre des mesures de représailles contre le pouvoir.
Mercredi, le président français Emmanuel Macron a demandé la libération des manifestants arrêtés "arbitrairement", lors d'un entretien téléphonique avec le milliardaire Bidzina Ivanichvili, président honoraire du Rêve géorgien.
Homme fort du pays, M. Ivanichvili est perçu comme manœuvrant dans l'ombre du pouvoir, bien qu'il n'occupe aucune fonction officielle.
M. Macron "a condamné les intimidations contre les représentants de la société civile et de l'opposition ainsi que les violences des forces de l'ordre contre les manifestants pacifiques et les journalistes", a encore indiqué la présidence française dans un communiqué.
Le Premier ministre Irakli Kobakhidzé a, quant à lui, qualifié les manifestants de "groupes violents" contrôlés par une opposition "libérale fasciste", terme souvent employé par le Kremlin pour cibler ses adversaires politiques.
C'est dans ce contexte de crise que doit avoir lieu samedi l'élection présidentielle au suffrage indirect.
Le futur président sera désigné pour la première fois par un collège électoral plutôt que par un vote populaire, conformément à un changement constitutionnel adopté par Rêve géorgien en 2017 et qui vise à renforcer sa domination sur le pays.
Le parti a ainsi désigné un ancien footballeur, Mikheïl Kavelachvili, devenu homme politique d'extrême droite, comme candidat.
L'actuelle présidente, l'ancienne diplomate française pro-occidentale Salomé Zourabichvili, en conflit avec Rêve Géorgien, a dénoncé la fraude généralisée qui aurait basculé les résultats des législatives en faveur du Rêve Géorgien.
Elle a déclaré que le parlement nouvellement élu et le gouvernement étaient "illégitimes" et affirmé qu'elle ne démissionnerait pas tant que les législatives ne seraient pas renouvelées, bien que son mandat prenne fin le 29 décembre.
Plusieurs ambassadeurs, un vice-ministre des Affaires étrangères et d'autres fonctionnaires ont démissionné à la suite de la suspension des négociations avec l'Union européenne, tandis que des centaines de fonctionnaires ont signé des déclarations communes pour protester contre la décision du gouvernement.
Les observateurs électoraux ont déclaré avoir découvert des preuves d'un système complexe de fraude électorale, tandis que Bruxelles a exigé une enquête sur les irrégularités électorales.
Rêve géorgien a rejeté les accusations de fraude et a insisté sur son engagement en faveur de la candidature de la Géorgie à l'adhésion à l'UE.
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