Les rives du lac artificiel de Jablanica, situé près de la commune bosniaque de Konjic, ont révélé un spectacle surprenant le 5 décembre 2024. Une grande partie de ce lac est maintenant à sec, conséquence directe d'une année marquée par de très faibles précipitations.
Saliha Kuljanin, habitante d'Ostrozac, un village pittoresque sur les bords du lac de Jablanica, ne cache pas son inquiétude. "Le climat a changé, c'est vrai, mais ceci est terrifiant!", s'exclame-t-elle.
La région, située entre Konjic et Jablanica dans le sud du pays, a vu le tourisme se développer de manière significative ces dernières années. Les résidents locaux ont tiré parti de cette opportunité en offrant aux visiteurs des hébergements ainsi que des promenades en bateau sur les eaux émeraude du lac.
Ces activités ont été possibles grâce aux eaux du lac alimentant la centrale hydroélectrique de Jablanica, située à quelques kilomètres en aval. Habituellement, à la fin de l'été, le niveau du lac diminue pour se préparer à absorber les pluies automnales. Cependant, cette année, la situation a été très différente.
Saliha Kuljanin, âgée de 68 ans, se souvient d'une époque où l'ancienne ville d'Ostrozac a été submergée par le lac en 1953. "Depuis, le niveau (du lac) fluctue, il baisse et remonte", explique-t-elle à l'AFP. Mais concernant la situation actuelle de pénurie d'eau, elle admet son incompréhension totale.
En ratissant le gazon qui a commencé à pousser autour de sa maison, elle soutient que cette parcelle de terre est normalement "recouverte d'eau".
Elle désigne également la plage voisine, située au pied de la maison de son cousin, où des plongeoirs ont été installés. La surface du lac, cependant, se trouve maintenant à plusieurs dizaines de mètres plus bas, et de nombreux bateaux sont échoués dans la boue, faute d'eau.
"Cette année, la sécheresse a été vraiment catastrophique. Le climat a changé, tout a changé. Mais cela! C'est effrayant", insiste Mme Kuljanin, se demandant si les turbines de la centrale n'auraient pas peut-être fonctionné "un peu trop" cette année pour produire de l'électricité.
Plus en amont, le lac a disparu sur plusieurs kilomètres. Son fond boueux est traversé par la rivière Neretva, qui descend des montagnes et alimente cette retenue d'eau, dont le volume est normalement d'environ 300 millions de m³.
Contactée par l'AFP, la société publique d'électricité qui gère la centrale de Jablanica, "Elektoprivreda BiH", a attribué la situation uniquement au manque de précipitations.
"L'année 2024 a été exceptionnellement mauvaise pour le fonctionnement des centrales. Comme il n'y a pas eu de neige l'hiver dernier, l'afflux dans la retenue au printemps a peut-être été à son niveau le plus bas depuis la création du lac", explique Fahrudin Tanovic, directeur exécutif chargé de la production.
Pour ne pas compromettre la saison touristique, la centrale a ralenti sa production durant un été "particulièrement sec également", ajoute-t-il.
"Nous sommes contraints de libérer au minimum 40 m³ d'eau par seconde à travers le barrage, alors que l'afflux variait entre 15 et 30 m³", précise M. Tanovic, admettant que le niveau actuel du lac est d'"environ 12 mètres en dessous du niveau (minimum) souhaitable".
Un rapport récent de l'Organisation météorologique mondiale (OMM), une agence de l'ONU, met en garde contre la multiplication des sécheresses intenses et des inondations extrêmes à travers le globe, annonçant un "avant-goût" des évolutions futures avec le changement climatique rendant le cycle de l'eau plus erratique.
L'OMM a constaté une aggravation mondiale du manque de ressources en eau. En examinant les données sur 33 ans, l'organisation a relevé que les cours d'eau de la planète avaient atteint un niveau de sécheresse sans précédent sur cette période.
Pour M. Tanovic, la situation à Jablanica est "certainement (due) au dérèglement climatique: nous avons de plus en plus souvent de fortes pluies concentrées en très peu de temps et sur une zone très restreinte. Et cela ne remplit pas la retenue d'eau".
Les inondations causées début octobre par de fortes pluies ont fait 27 morts en Bosnie, principalement dans cette région, causant d'importants dégâts dans plusieurs villages.
Il est indéniable que les conditions météorologiques extrêmes ont des conséquences de plus en plus graves sur les infrastructures et les écosystèmes. La situation à Jablanica est un exemple frappant des défis auxquels nous sommes confrontés. Le changement climatique nécessite une adaptation et une action globale pour atténuer ses effets dévastateurs.
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