Acteur et metteur en scène renommé, Charles Berling a interprété plus d'une centaine de rôles tant au théâtre qu'au cinéma. Depuis 2011, il est à la tête du Centre dramatique national de Toulon-Châteauvallon, élégamment nommé "Théâtre Liberté". À travers cette double casquette d'artiste et de responsable institutionnel, il nous partage sa perspective sur l'exception culturelle, tout en exprimant une inquiétude palpable. Cet entretien par Judith Sibony est à retrouver dans la newsletter Le Plein d’idées de Challenges.
L'article, initialement paru dans La Revue des Deux Mondes en décembre-janvier 2024/2025, nous interroge sur ce que représente, pour Charles Berling, l'exception culturelle française. Sa réponse est claire et sans équivoque : il s'agit d'extraire l'art et la culture de l'impitoyable logique du marché. Pour lui, défendre l'exception culturelle, c'est affirmer haut et fort que l'art ne peut être réduit à un simple produit commercial. Il considère ce principe fondamental au même niveau que la Constitution ou l'État de Droit, y voyant l'un des piliers de notre démocratie. Dans un monde où le capitalisme menace de tout dévorer, y compris les biens publics, l'exception culturelle demeure selon lui un ultime bastion de défense, indispensable.
Charles Berling souligne l'importance de la culture en tant qu'élément essentiel. Peu avant cet entretien, il écoutait un concert des Arts Florissants, dirigé par le célèbre chef d'orchestre William Christie. Submergé par l'émotion, il témoigne de l'effet profond que procure une interprétation Händel menée avec tant de passion et de précision. Selon lui, l'art ne se consomme pas comme des biens ordinaires. C'est une dimension à part, une nécessité vitale qu'il est crucial de revaloriser au sein de notre société. La profondeur et l'unicité de l'art sont des aspects à remettre au cœur de nos préoccupations quotidiennes.
Face aux accusations d'élitisme souvent dirigées contre l'exception culturelle, Charles Berling réplique en qualifiant ces critiques de jugements erronés. Aux débuts de son immersion dans l'univers de l'exception culturelle, il n'était qu'un jeune homme un peu perdu à Toulon, une ville alors gangrenée par la mafia et l'extrême droite, loin d'être reconnue pour son rayonnement culturel. Cependant, avec la présence de Châteauvallon, ce pôle de création culturelle subventionné, il a pu découvrir et s'épanouir au sein de cet espace d'expression artistique.
L'expérience personnelle de Charles Berling illustre ainsi combien l'élitisme associé à la culture peut être un préjugé, une vision réductrice qui ne tient pas compte des opportunités offertes à tous, y compris aux plus éloignés de ce milieu, pour découvrir et s'approprier l'art sous toutes ses formes.
Dans un contexte où la mondialisation et l'ultralibéralisme tendent à uniformiser les pratiques culturelles, l'exception culturelle se positionne comme un rempart crucial contre la banalisation de l'art. Il demeure cependant des défis à surmonter pour préserver cette spécificité française. Selon Berling, il s'agit avant tout de lutter pour la diversité des créations culturelles et pour le soutien permanent aux artistes et aux institutions culturelles. Il appelle à une vigilance constante et à un effort commun pour éviter de céder ce qui fait la richesse de notre patrimoine culturel.
Enfin, l'art, pour Charles Berling, reste un vecteur indispensable de l'identité nationale, offrant non seulement une forme d'émancipation personnelle et collective, mais aussi une contribution inestimable au rayonnement de la société française dans son ensemble. Il exhorte donc les citoyens, les pouvoirs publics et le secteur privé à reconnaître et à chérir cet héritage inestimable, essentiel à l'âme de notre nation.
À travers ses propos, Charles Berling nous rappelle l'importance cruciale de défendre l'exception culturelle française face aux pressions multiples qu'elle subit. L'engagement de cet acteur du monde culturel se veut un appel à l'action pour que l'art et la culture continuent de s'épanouir en dehors des contraintes mercantiles, garantissant ainsi la pérennité de notre identité culturelle unique et plurielle.
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