En septembre dernier, Michel Bourez s'est rendu dans le Sud-Ouest pour participer au Quiksilver Festival pour la deuxième fois. Peu avant cet événement, le surfeur tahitien avait annoncé sa retraite sportive lors de la cérémonie de passage de la flamme olympique à Tahiti. Nous avons discuté avec l'athlète qui, pendant 13 saisons, a représenté les couleurs françaises et polynésiennes au plus haut niveau du circuit mondial.
Michel Bourez : J'ai décidé de conclure mon parcours en tant que surfeur professionnel mais je resterai toujours un surfeur dans l'âme et dans mon quotidien. Je n'ai plus le désir de voyager et de faire les sacrifices que cela implique; je préfère désormais rester chez moi, profiter de mes amis, ma famille, et surtout de mes enfants. Quand j'ai appris que les Jeux Olympiques allaient se tenir à Tahiti, j'étais encore actif sur le circuit mais le désir d'arrêter était déjà là. Je m'étais dit que je prolongerai ma carrière jusqu'à ces jeux pour qu'un Tahitien soit présent dans la sélection. Cependant, après être sorti du Tour, avec les complications dues à la COVID-19 et ensuite une blessure qui a rendu le retour difficile, j'ai dû accepter que c'était le bon moment pour arrêter. Physiquement, je ne pouvais plus suivre le rythme que demandait la compétition de haut niveau.
En regardant en arrière sur votre carrière, quel héritage espérez-vous laisser?
Michel Bourez : Contrairement à d'autres, je ne souhaite pas que l'on se souvienne particulièrement de moi (rires). Mon but n'a jamais été d'être mémorable. J'ai fait ce que j'ai fait parce que j'aimais sincèrement ce milieu et que je me fixais des objectifs à atteindre. Si les gens doivent se rappeler de moi, j'aimerais qu'ils se souviennent de quelqu'un qui a réussi avec les moyens à sa disposition. Je ne viens pas d'un milieu où le chemin était tracé pour moi, j'ai appris par moi-même et réussi grâce à ma détermination.
L'été dernier, vous aviez exprimé le souhait de vous investir auprès des jeunes surfeurs tahitiens. Est-ce toujours votre ambition?
Michel Bourez : J'en ai en effet envie, mais je préfère d'abord voir comment les choses se mettent en place à Tahiti. Je ne vise pas forcément un rôle de coach, mais je souhaite observer, donner mon opinion et partager mon expérience avec les entraîneurs qui travaillent avec les jeunes. Le plus important sera d'aider à former les coachs et de transmettre ma vision. Sans une expérience du Tour, certains aspects du surf de compétition peuvent échapper, même si ce sont des subtilités importantes à intégrer.
Vous avez été le dernier à porter la flamme olympique à Tahiti. Que représentait ce moment pour vous?
Michel Bourez : Je n'avais pas vraiment conscience de l'importance de ce rôle ni des codes qui l'accompagnent. Ils ont gardé le mystère sur le dernier porteur et cela ne me préoccupait pas plus que cela. Quand ils m'ont informé que c'était moi, j'ai réalisé l'opportunité de marquer les esprits de nos athlètes. J'ai voulu leur transmettre toute l'énergie et la force qu'il me restait, en particulier à nos surfeurs locaux, Kauli et Vahine, en sachant que nous étions à domicile. Ce fut mon moment de dire "c'est fini pour moi, à vous de faire vos preuves".
Avez-vous apprécié le rôle de consultant pour Polynésie la 1ère lors des Jeux Olympiques?
Michel Bourez : On m'a proposé de commenter pour la télévision ce qui était parfait car je voulais être impliqué dans ces Jeux Olympiques chez nous. C'était important pour moi de partager mon expérience. Connaître tout le monde sur le circuit a facilité les échanges. Je parle le même langage que les surfeurs, ce qui a permis un accès plus intime à leurs personnalités.
La victoire de Kauli Vaast a dû être un moment mémorable pour vous?
Michel Bourez : C'était effectivement un moment inoubliable pour nous tous. Bien que certains disent que c'était écrit, cela ne l'était pas du tout. Kauli a accompli du bon travail. Sa rencontre avec Joan en quart de finale était déjà un grand moment comme une finale. Kauli a tout donné, soutenu par une bonne équipe, et a fait les sacrifices nécessaires. Sa victoire n'est contestée par personne.
Cela contribue-t-il à inspirer les générations futures?
Les nouvelles générations à Tahiti ont un niveau impressionnant. Tya Zebrowski, Kiara Goold, Liam Sham Koua, Takihei Ellacott, tous ces jeunes sont très talentueux. Ils voyagent en Europe et gagnent partout où ils passent. Je les invite à venir chez nous pour comprendre notre mentalité, surfer nos vagues, et voir d'où vient cet enthousiasme et ce niveau. Un échange profiterait aux jeunes français aussi, car le futur du surf est chez nous. Aujourd'hui, les jeunes sont bien encadrés, traités comme des professionnels, même sans installations de pointe. Il s'agit de se rendre à l'eau, de comprendre, d'avoir un coach attentif qui vous aide à progresser, et surtout de s'amuser. Maintenant, les jeunes se concentrent beaucoup sur la compétition, ce qui est bien, mais il ne faut pas perdre le fun et le partage de bonnes sessions entre surfeurs.
Comment envisagez-vous la suite? Prendrez-vous du temps pour retrouver le plaisir du surf?
Michel Bourez : Je veux trouver du plaisir dans le sport, en dehors du surf. Ayant atteint ce que je pouvais dans le surf, je souhaite employer mon expérience dans un autre domaine. Je me suis inscrit dans une salle de MMA à Tahiti, une continuation logique après mes années de jujitsu où j'ai atteint le niveau de ceinture mauve. Pour moi, le MMA est une passion, il permet d'apprendre la technique et renouvelle sans arrêt l'intérêt. Contrairement au surf qui dépend de conditions incontrôlables, le MMA se base sur la répétition et la réaction face à un adversaire. C'est enrichissant intellectuellement et physiquement. C'est aussi un excellent moyen de se défouler et de partager des moments intenses entre amis.
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